Rostov la Grande, l'une des plus anciennes villes de Russie, est célèbre non seulement pour son Kremlin en pierre blanche, où Leonid Gaidai a tourné il y a un demi-siècle le film "Ivan Vassilievitch change de métier". Elena Bessonova, fondatrice de SAVVA Culture, une chaîne Telegram consacrée à la culture et à l'histoire russes, vous dira ce qu'il faut voir et, surtout, où loger.
Фэшн-гуру, консультант в области моды, основатель Telegram-канала SAVVA Culture о русской культуре и истории
Mon prochain voyage à Rostov a commencé par une rencontre étonnante. C'est là que j'ai rencontré Elena et Benoit Lardy, un couple russo-français qui, il y a quelques années, a décidé d'ouvrir une maison d'hôtes dans l'arrière-pays russe. "La maison Lardy est située dans l'un des endroits les plus pittoresques de la région de Yaroslavl, le village de Lomy. Le terrain est vallonné et les vues sur les champs et les prairies à perte de vue sont absolument fantastiques, comme dans les peintures de Polenov ou de Shishkin.
Le meilleur moyen d'explorer la nature locale est le vélo, en s'arrêtant dans les maisons en bois des voisins et en discutant avec les villageois.
La rue principale de Lomy, connue sous le nom de Stary Posad, est bordée d'allées de tilleuls et compte un certain nombre de cabanes en bois d'une beauté exceptionnelle, dont certaines ont été construites il y a de nombreuses années. Les grands-mères locales vivent encore dans les izbas et sont heureuses de raconter aux visiteurs de Dom Lardy des histoires intéressantes sur la région. Pour être honnête, nous les écoutions ! D'ailleurs, nous avons découvert que les anciens de ces lieux ont toujours un accent "okey" perceptible.
Rostov le Grand est célèbre pour son artisanat populaire, parmi lequel se distingue l'émail, une variété d'émail pictural importée de France le long des anciennes routes commerciales. Après une promenade mouvementée, nous avons décidé de nous essayer aux beaux-arts et de peindre des carreaux. Il s'agit d'un processus sans hâte et presque méditatif, qui vous détend et vous fait tout oublier pour vous concentrer sur la peinture. Après une heure de travail minutieux, j'ai réussi à peindre un paysage plutôt réussi, bien que je ne sois pas un grand artiste.
La soirée suivante était annoncée comme un événement littéraire, et nous avons reçu la visite d'un autre couple remarquable, les écrivains et historiens moscovites Alexey et Elena Grigorenko, qui passent leurs vacances dans le village de Lomy. Alexey nous a parlé de son livre "En quete de ce qui n’est plus", consacré au village de Gumenets, situé à quelques pas du village de Lomy, à sa riche paroisse et à ses habitants, qui ont été expulsés de leur région natale en raison de la collectivisation qui a débuté dans les années 1930 en URSS, et dont l'église a été détruite. Alexei et Elena font des recherches sur l'histoire de ces lieux depuis plus de trente ans, en commençant par l'invasion mongole de la Russie. Les écouter dans le salon douillet du Dom Lardy est un plaisir !
Quant au programme des visites, il était cette fois-ci très inhabituel. Il s'est avéré qu'à seulement 10 kilomètres du Dom Lardy se trouve le domaine de Voronino, qui appartenait jusqu'en 1917 à la noble famille Leontiev. Après la révolution, il a subi le même sort que des milliers d'autres domaines nobles dans toute la Russie. Et nous n'aurions probablement rien appris à ce sujet sans un descendant direct des nobles Leontiev et du généralissime Suvorov lui-même, l'entrepreneur Sergey Aleksandrovich Leontiev, qui a acheté il y a quelques années la maison de ses ancêtres, l'a restaurée, s'y est installé et raconte aujourd'hui aux touristes l'histoire de sa famille.
Pour des raisons évidentes, il ne reste pratiquement plus de domaines vivants dans notre pays. Mais "Voronino" est une maison résidentielle, où les visiteurs sont admis en tant qu'invités. Seul le rez-de-chaussée, où se trouvent le musée et une petite salle de danse, est ouvert aux excursions. On peut y voir les albums de jeunesse des arrière-arrière-grands-mères du propriétaire, une lorgnette, des copies de tableaux aujourd'hui conservés au Kremlin de Rostov, des sabreurs russes trouvés près du pont du Diable, des portraits et des sculptures de Suvorov, ainsi que des documents provenant des archives de la famille.
Un autre point fort culturel de notre voyage a été le musée d'art populaire, qui a ouvert ses portes grâce à l'initiative privée d'Anastasia Aristova, une entrepreneuse qui n'est pas indifférente au patrimoine culturel de Rostov. Il y a quelques années, elle a acheté l'une des maisons historiques de la ville, l'a restaurée avec ses propres fonds et y a ouvert un musée avec Alexander Ilyin.
L'exposition comprend plus de 250 pièces provenant de Sibérie, du nord de la Russie, du sud et du centre de la Russie et d'autres régions. Il s'agit d'icônes folkloriques uniques, d'échantillons de broderie, de rouets, de coffres peints et de portes de cabane, d'objets ménagers, d'outils de travail et de bien d'autres choses encore. Ne manquez pas d'inscrire ce musée sur la carte de votre futur voyage - la collection est vraiment impressionnante!
En verite, nous avions des projets napoléoniens pour ce voyage, bien sûr. Nous n'avons pas vu la moitié de ce que nous avions prévu de voir, nous n'avons pas atteint le monastère des Saints Boris et Gleb et la célèbre laiterie Rostov Filimonov Razdolie, fondée autrefois par le célèbre fromager français Patrice Norman. Il y a quelques années, il a transmis son savoir à ses collègues russes, qui continuent à maintenir un haut niveau de qualité.
Mais pour être honnête, il arrive qu'après une journée remplie d'excursions fascinantes, on ait envie de s'asseoir sur la terrasse de sa belle maison et de contempler en silence la lune et les étoiles, qui brillent ici d'un éclat particulier. Penser aux belles personnes que vous avez rencontrées pendant les deux jours de votre voyage, passionnées par l'histoire et la culture de leur pays, ou, comme dans le cas de Benoit Lardy, qui se sent tellement à l'aise ici. Cela fait chaud au cœur et rend heureux !
